FABRICATION du Saké
Le saké est un alcool japonais obtenu par fermentation du riz. C’est une boisson de savoir-faire : toutes les décisions du maître brasseur à chaque étape de la fabrication auront une influence sur le goût, les arômes ou encore le corps du saké.
Les ingrédients du saké

Le riz

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Le saké est produit à partir de riz de type Japonica, qui englobe pas moins de 300 variétés. On distingue deux grandes familles de riz Japonica : le shokumai ou “riz alimentaire”, et le sakamai, “riz à saké”. Même s’il n’est pas rare de fabriquer du saké à partir de shokumai, c’est avec du sakamai, plus riche en amidon et plus adapté au polissage (voir plus bas), que sont brassés la plupart des sakés supérieurs.

La variété de riz utilisée n’est pas neutre et influe grandement sur le résultat final, c’est pourquoi elle est souvent mentionnée sur l’étiquette. Les principales variétés de riz sont :

  • Yamada-nishiki, la “reine des variétés”, utilisée dans tous types de sakés, surtout de type aromatiques.
  • Gohyakumangoku, à l’origine de la mode des sakés légers et secs.
  • Miyama-nishiki, qui donne des sakés doux et aromatiques.
  • Omachi, variété la plus ancienne qui soit, originaire d’Okayama, donnant des sakés rustiques.

​Il existe des variétés propres à certaines régions, présentes depuis longtemps dans le terroir, ou alors développées récemment par les acteurs locaux, comme par exemple le Hattan-nishiki à Hiroshima, le Saga-no-hana à Saga, ou le Saka-nishiki à Shimane.

L’eau

Le saké est composé à plus de trois quarts d’eau. C’est un ingrédient essentiel dont les particularités vont se répercuter sur le produit final. Les producteurs utilisent généralement une eau qu’ils puisent eux-même sur leur terrain, ou qu’il acheminent depuis un source proche de leur maison de saké.

La quantité de minéraux présents dans l’eau est notamment un facteur déterminant puisque que ceux-ci activent les levures pendant la fermentation (voir plus bas). Les eaux dures (beaucoup de minéraux) donnent des sakés qui ont tendance à avoir beaucoup de corps, tandis que les eaux douces permettent de produire des sakés plus doux et plus fins. Il faut noter que pendant longtemps l’eau douce était peu propice au brassage de qualité car le riz a du mal à se décomposer dans ce type de liquide, et que c’est à Hiroshima sont nées plusieurs innovations majeures qui ont non seulement rendu cela possible, mais qui ont aussi élevé la qualité du saké en général. Voir ici pour plus d’infos.

Sankan saké japonais eau source
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Le kôji

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Lors de la fermentation alcoolique, des sucres sont transformés en alcool. Or il n’y a pas de sucre dans le riz, contrairement par exemple au raisin qui sert à fabriquer le vin. Pour remédier à ce problème, on utilise un champignon microscopique appelé kôji-kin (aspergillus oryzae), qui va changer l’amidon du riz en sucres, transformant ainsi le riz cuit en kôji. Il existe plusieurs types de kôji, et plusieurs façons de le produire en fonction du type de saké recherché et du « style » de la maison. Sa qualité va grandement influer sur le goût du sacré, c’est pourquoi les producteurs apportent un très grand soin à sa fabrication.

Les levures

Les sucres se transforment en alcool sous l’effet d’autres micro-organismes : les levures. Celles-ci sont la plupart du temps achetées par le producteur à une coopérative et ajoutées dans les cuves. Il en existe différentes sortes en fonction du type de saké recherché, plutôt minéral et sec, plutôt riche et fruité, etc. Certains brasseurs sont équipés de laboratoires afin d’élever eux-mêmes leurs propres levures, ce qui leur permet de produire des sakés qui expriment des saveurs uniques. Enfin, il existe des sakés produits sans levures ajoutées : ce sont alors des levures vivant naturellement dans la brasserie que l’ont fait se multiplier dans les cuves. Ces sakés (Kimoto ou Yamahai) sont généralement plus expressifs, avec beaucoup de corps.

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Les étapes de fabrication du saké
 le polissage

C’est l’amidon contenu dans le riz qui va, au terme d’un double processus, se transformer en alcool. Or cet amidon est concentré au centre du grain de riz, c’est pourquoi on commence par enlever la partie extérieure, qui contient notamment des protéines, des lipides et des minéraux non désirés : c’est l’étape du polissage.

Plus le riz est poli, plus sa teneur en amidon est forte, et plus le saké sera fin et complexe. Un fort polissage n’est cependant pas une condition nécessaire pour produire des sakés de qualité : il en existe de très bons fabriqués avec un riz peu ou moyennement poli.

Le taux de polissage s’exprime en pourcentage (on parle de “seimaibuai” en japonais), il permet de connaître la quantité résiduelle de riz. Ainsi, un taux de 60% par exemple, signifie qu’il reste 60% du grain de riz après le polissage. Donc plus le taux est faible, et plus le riz est poli. C’est ce pourcentage qui classe le saké en plusieurs grandes catégories : Junmai (peu poli), Junmai Ginjô (moyennement poli), Junmai Dai-ginjô (très poli). Voir ici pour plus d’informations sur les catégories.

Le lavage et l’immersion

Le riz ainsi poli est stocké quelques semaines afin de le stabiliser. La production peut ensuite débuter.

On commence avant toute chose par laver le riz, une étape qui permet de le débarrasser des poussières et résidus de polissage. On immerge ensuite le riz pour lui faire absorber une certaine quantité d’eau, afin que la cuisson soit optimale. Plus le riz a été poli, plus le riz est poreux, et plus l’étape d’immersion est courte, il n’est pas rare de chronométrer à la seconde près.

La cuisson et le refroidissement

Le riz est cuit à la vapeur dans une grande cuve de plusieurs centaines de kilos de contenance. Une fois l’opération terminée, le riz doit être refroidi rapidement afin que la cuisson ne continue pas. Pour cela, soit on étale manuellement le riz cuit, soit on utilise une machine qui souffle de l’air frais, avant de passer à l’étape suivante.

La préparation du kôji

Il est maintenant temps de produire du kôji, un ingrédient indispensable à la fabrication du saké. En effet, pour qu’il y ait fermentation alcoolique, il faut du sucre. Or le riz est surtout constitué d’amidon, et ne contient pas de sucre. En colonisant le riz cuit, le kôji va permettre la saccharification, autrement dit la transformation de l’amidon en sucre

On fabrique le kôji ainsi :  une fois refroidi, une partie du riz cuit est transporté dans une salle spéciale et étalé sur de grandes tables. On saupoudre ensuite dessus un champignon microscopique appelé kôji-kin (aspergillus oryzae) sous la forme d’une fine poudre verte. Au bout de généralement deux jours, durant lesquels on manipule plusieurs fois le riz dans une atmosphère chaude et humide, les champignon s’est propagé sur tout le riz, qui s’est un peu cristallisé et est devenu naturellement sucré : le kôji est prêt.

La préparation du pied de cuve

Lors de la fermentation, ce sont des levures qui vont transformer le sucre (créé par le kôji à partir de l’amidon) en alcool. Levures et kôji sont des êtres vivants dont la multiplication doit être maîtrisée, c’est pourquoi avant de mélanger tous les ingrédients dans une grande cuve, il va falloir créer le pied de cuve, ou “shubo” en japonais (酒母, littéralement “mère du saké”).

D​ans une petite cuve, on mélange riz cuit, eau, kôji, levures et acide lactique. Le kôji va contaminer le riz cuit, transformant ainsi progressivement l’amidon en sucre. En simultané, les levures vont transformer ce sucre en alcool. Les maîtres brasseurs peuvent choisir parmi toute une gamme de levures, chacune ayant des propriétés différentes. Tout comme les variétés de riz, certaines régions développent elles-même des levures au niveau local. Le type de levure est parfois indiqué sur l’étiquette. L’acide lactique quant à lui permet de maintenir dans le mélange un environnement suffisamment acide pour prévenir l’apparition d’organismes non désirés.

Au bout d’environ deux semaines pendant lesquelles on va l’agiter et modifier plusieurs fois sa température, le shubo est prêt. Véritable concentré de micro-organisme, il va servir à démarrer la fermentation principale qui aura lieu dans de grandes cuves.

Certains sakés sont dits “Kimoto” ou bien “Yamahai”, qui sont des méthodes anciennes de brassage. Cela signifie qu’ils ne contiennent pas d’acides lactiques ajoutés : le brasseur les fait apparaître naturellement à partir de bacilles présents dans la brasserie. Parfois le brasseur choisit aussi de ne pas rajouter de levures, qui là aussi se développent à partir de souches vivant dans les bâtiments de la brasserie.

Le mélange des ingrédients

Nous avons maintenant tout ce qui est nécessaire à la fermentation du saké! Tous les ingrédients vont être mélangés dans des cuves de plusieurs centaines ou milliers de litres. Comme nous l’avons vu plus haut pour le shubo, kôji et levures sont des organismes vivants, c’est pourquoi il est absolument nécessaire de maîtriser leur développement.

On va pour cela remplir les grandes cuves en plusieurs étapes selon la méthode dite “sandan-jikomi” (“fermentation en trois étapes”). On commence le premier jour par mélanger un peu de riz cuit, d’eau, de kôji et le pied de cuve, qui va servir à faire démarrer la double fermentation (transformation amidon en sucre, et sucre en alcool). Le deuxième jour, on laisse le tout reposer. Le troisième jour, on rajoute encore du riz cuit, de l’eau et du kôji (il n’y a plus besoin de shubo puisque la fermentation a déjà commencé). Enfin le dernier jour on fait un ajout similaire de riz cuit, eau et kôji.

La fermentation principale

On va laisser ensuite fermenter le tout entre deux et quatre semaines habituellement. Les sakés premiums de type Ginjô et Dai-ginjô sont fermentés longuement à basse température, selon une technique inventée à Hiroshima.

On ne peut pas maîtriser la fermentation avec des hautes températures, c’est pourquoi les maisons qui travaillent de façon artisanale ne brassent qu’entre octobre et avril. L’exigence de qualité toujours plus grande, ainsi que le réchauffement climatique, poussent ces dernières années les brasseurs à s’équiper en cuves qui permettent le contrôle de la température.

La presse

Même quand la fermentation a pris fin, tout le riz n’a pas été dissous, il reste dans les cuves de grandes quantités de matière solide. Il faut donc presser le tout afin de ne conserver que le liquide.

​L’étape de la presse peut se faire de plusieurs manières différentes : gravitation, presse traditionnelle, presse moderne, etc., les premières étant réservées généralement aux sakés premiums. Après pressage, le liquide est mis à reposer plusieurs jours afin que fines particules et restes de levures se déposent au fond de la cuve.

Il est à noter que l’on peut volontairement laisser passer une partie des parties solides pour produire un type particulier de saké peu filtré : le Nigori.

La clarification

Depuis le début du 20e siècle, on considère qu’un bon saké doit être très clair, voire complètement incolore. La plupart des fabricants clarifient donc leurs sakés à l’aide de filtres aux charbons actifs, sans quoi ils prendraient des couleurs proches de certains vins blancs. 

Cette clarification permet également de faire disparaître certains goûts non désirés, mais certaines maisons de saké considèrent aussi qu’elle enlève au saké un peu de son caractère. C’est pourquoi il existe un type de sakés “non clarifiés”, les Muroka.

 La dilution

Après la fermentation, le liquide que l’on obtient par pressage titre environ à 20% d’alcool. Une telle valeur ne permet pas d’apprécier toutes les nuances de la plupart des sakés, c’est pourquoi on les dilue avec de l’eau pour atteindre une valeur qui se situe généralement entre 15% et 17% en moyenne. Il va sans dire que l’eau ajoutée est une eau de qualité, la même qui a servi à la fermentation du saké généralement.

Il existe toutefois certains sakés non dilués, les Genshu, qui titrent souvent entre 17% et 20%. Il sont plus “bruts” et jouissent d’un corps puissant. Il est possible de les diluer chez soi avec un peu d’eau, voire même de les boire avec des glaçons si leur profil aromatique le permet.

La pasteurisation

Contrairement au vin, le saké ne contient aucuns sulfites ou autres conservateurs. Il est donc nécessaire de le pasteuriser afin qu’il puisse se conserver à température ambiante.

​La pasteurisation se fait à basse température, soit en machine, soit en bouteille au bain marie. La plupart des sakés sont pasteurisés deux fois (avant maturation en cuve ou en bouteille, puis avant expédition), mais certains ne le sont qu’une fois afin de préserver au maximum la richesse des saveurs et des arômes. Notons que la pasteurisation du saké est décrite dans un ouvrage en 1599 soit… plus de 250 ans avant les travaux de Pasteur !

Il existe des sakés non-pasteurisés, souvent très intéressants gustativement : les Nama. Ils doivent impérativement être conservés en réfrigérateurs, et consommés dans les mois qui suivent leur fabrication, c’est pourquoi ils sont malheureusement rares et onéreux en Europe.

La maturation, le vieillissement et l’embouteillage

Certains sakés sont embouteillés et commercialisés immédiatement après la presse, mais la plupart sont d’abord stockés en cuves ou en bouteilles quelques mois afin de les “fixer” et d’équilibrer leurs arômes et saveurs.

​Il est couramment admis que le saké est bon quand il est jeune, ce n’est pas un alcool de garde comme le vin. Le saké vieilli existe, mais il s’agit d’une exception : c’est le Koshu. Les règles sont vagues, mais on considère qu’un saké est un Koshu au bout de trois ans de vieillissement. Celui-ci se fait généralement en cuve en inox, parfois en fûts de cèdre, et très rarement en tonneaux (chêne ou autre).

​Le saké se mesure traditionnellement en “” 合, une unité de mesure japonaise correspondant environ à 180cl. C’est pourquoi les bouteilles les plus souvent utilisées sont celles de 720ml (soit quatre “gô”, la valeur la plus proche des bouteilles de vin de 750cl) ou bien de 1,8l (dix “gô”), très utilisées par les professionnels. Il existe aussi des bouteilles de 300cl, 500cl, etc.

La dégustation

Le saké est prêt et vous venez d’en acheter une bouteille, il ne reste plus qu’à le déguster (avec modération), kampai 乾杯! Pour plus d’informations sur le saké, rendez-vous sur notre page Le saké c’est quoi?